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L'Assignation à Résidence Sous Surveillance Électronique (ARSE) : comprendre cette alternative à la détention provisoire

Photo du rédacteur: Julien PloutonJulien Plouton

Dernière mise à jour : il y a 5 heures

Dans le système judiciaire français, l'Assignation à Résidence Sous Surveillance Électronique (ARSE) constitue une mesure importante qui concilie les nécessités de l'enquête avec le principe de présomption d'innocence. Notre Cabinet vous propose un éclairage complet sur ce dispositif qui permet à une personne mise en examen d'éviter la détention provisoire tout en restant sous contrôle judiciaire.


 

Qu'est-ce que l'Assignation à Résidence Sous Surveillance Électronique ?


L'ARSE est une mesure judiciaire qui permet à une personne mise en examen de demeurer à son domicile (ou dans une résidence fixée par le juge) plutôt que d'être placée en détention provisoire, tout en étant surveillée à distance par un dispositif électronique.

Cette mesure s'inscrit dans une volonté de limiter le recours à l'incarcération avant jugement, particulièrement lorsque les nécessités de l'enquête ou la protection de la société peuvent être assurées par des moyens moins restrictifs que la détention en établissement pénitentiaire.

Important : Contrairement à la Détention Domiciliaire Sous Surveillance Électronique (DDSE) qui s'applique aux personnes condamnées, l'ARSE concerne uniquement les personnes mises en examen pendant la phase d'instruction, avant tout jugement définitif.
 

Cadre juridique et conditions d'application


Base légale


L'ARSE est régie par les articles 142-5 à 142-13 du Code de procédure pénale. Son cadre a été récemment précisé par le Décret n° 2025-154 du 19 février 2025, notamment concernant les situations où l'ARSE est ordonnée sous condition suspensive de faisabilité technique.


Qui peut ordonner l'ARSE ?


L'ARSE peut être ordonnée par :

  • Le juge d'instruction au cours de l'information judiciaire

  • Le juge des libertés et de la détention (JLD), notamment lorsqu'il est saisi pour des questions relatives à la détention provisoire


Critères d'éligibilité

Critères

Conditions requises

Pour les majeurs

Personne mise en examen encourant une peine d'emprisonnement correctionnel d'au moins 2 ans ou une peine plus grave

Pour les mineurs

Mineur âgé de 16 ans ou plus encourant une peine d'emprisonnement d'au moins 3 ans

Cas spécifiques

Personne mise en examen pour violences ou menaces (punies d'au moins 5 ans d'emprisonnement) contre son conjoint, concubin, partenaire de PACS ou enfants

Condition technique

Vérification de la faisabilité technique par le Service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP)

Consentement

Consentement obligatoire de la personne à l'installation du dispositif (le refus peut entraîner la détention provisoire)

Domicile

Si le lieu d'assignation n'est pas le domicile de la personne, accord écrit du propriétaire ou du titulaire du contrat de location

Le processus de mise en place de l'ARSE


La mise en place de l'ARSE suit une procédure précise :

  1. Ordonnance motivée : Le juge d'instruction ou le JLD rend une ordonnance détaillant :

    • Le lieu d'assignation

    • Les jours et horaires pendant lesquels la personne doit y être présente

    • Les motifs autorisés d'absence

    • Les éventuelles obligations supplémentaires

  2. Vérification technique : Le SPIP évalue la faisabilité technique de la surveillance au lieu d'assignation (couverture réseau, électricité, etc.)

  3. ARSE conditionnelle : Depuis la loi du 20 novembre 2023 et selon le décret du 19 février 2025, le JLD peut ordonner une "assignation à résidence sous surveillance électronique conditionnelle" (ARSEC) avec incarcération provisoire (maximum 15 jours) pendant la vérification de faisabilité

  4. Installation du dispositif :

    • Pose du bracelet électronique (généralement à la cheville) par le personnel de l'administration pénitentiaire

    • Installation d'une unité réceptrice au domicile, branchée sur une prise électrique

    • Réglage des paramètres de surveillance

  5. Information et consentement : La personne est informée de ses obligations et doit donner son consentement écrit


 

La vie quotidienne sous ARSE : obligations et restrictions

Obligations principales


La personne placée sous ARSE doit respecter plusieurs obligations :

Obligation

Description

Présence obligatoire

Demeurer au lieu d'assignation pendant les périodes fixées par le juge

Absences autorisées

Ne sortir qu'aux horaires et pour les motifs expressément autorisés

Convocations

Répondre aux convocations de toute autorité ou personne désignée

Préservation du matériel

Ne pas endommager le bracelet ou le récepteur

Signalement

Informer le SPIP de tout changement dans sa situation

Obligations supplémentaires possibles


Le juge peut également imposer tout ou partie des obligations du contrôle judiciaire prévues aux articles 138 et suivants du Code de procédure pénale, comme :

  • Interdiction de rencontrer certaines personnes

  • Interdiction de fréquenter certains lieux

  • Obligation de remettre ses documents d'identité ou son permis de conduire

  • Obligation de suivre des soins médicaux ou psychologiques

  • Interdiction de détenir une arme


Motifs d'absence autorisés


Le juge peut autoriser la personne à s'absenter de son lieu d'assignation pour différents motifs :

  • Exercer une activité professionnelle

  • Suivre un enseignement ou une formation

  • Se soumettre à des soins médicaux

  • Participer à la vie de famille

  • Accomplir des démarches administratives

  • Se présenter aux convocations judiciaires


 

Comparaison entre l'ARSE et d'autres mesures judiciaires


Le tableau ci-dessous permet de comparer l'ARSE avec d'autres mesures de contrôle judiciaire :

Caractéristique

ARSE

Détention provisoire

Contrôle judiciaire simple

DDSE (après condamnation)

Phase concernée

Instruction (avant jugement)

Instruction (avant jugement)

Instruction (avant jugement)

Après condamnation

Lieu d'exécution

Domicile ou résidence désignée

Établissement pénitentiaire

Liberté avec restrictions

Domicile ou résidence désignée

Surveillance

Électronique (bracelet)

Directe (personnel pénitentiaire)

Ponctuelle (convocations)

Électronique (bracelet)

Restriction de liberté

Forte mais à domicile

Totale

Modérée

Forte mais à domicile

Maintien activité pro

Possible avec autorisation

Impossible ou très limitée

Généralement possible

Possible avec autorisation

Contacts sociaux

Limités aux horaires autorisés

Très limités (visites)

Peu affectés (sauf interdictions)

Limités aux horaires autorisés

Durée maximale

Variable selon l'instruction

Variable selon l'infraction

Variable selon l'instruction

6 mois (peine) ou durée de la condamnation (aménagement)

Déduction de peine

Intégralement déduite

Intégralement déduite

Non déduite

N/A (est la peine)

 

Conséquences en cas de non-respect des conditions


Le respect des obligations imposées dans le cadre de l'ARSE est primordial. Voici les conséquences d'une violation des conditions :

Système d'alerte et vérification

  • Toute absence non autorisée ou tentative de manipulation du bracelet déclenche une alarme au centre de surveillance

  • Le centre contacte alors la personne pour vérifier la situation

  • Le SPIP peut également effectuer des contrôles téléphoniques inopinés ou des visites au domicile


Sanctions prévues

Type de violation

Sanctions possibles

Qui décide

Absence injustifiée

Émission d'un mandat d'arrêt ou d'amener Placement en détention provisoire

Juge d'instructio

Manipulation du bracelet

Poursuites pénales en plus de la révocation de l'ARSE

Tribunal correctionnel

Non-respect des horaires

Avertissement ou révocation selon la gravité

Juge d'instruction

Violation d'interdictions

Révocation et placement en détention provisoire

JLD

Le non-respect des obligations de l'ARSE peut donc entraîner des conséquences graves, la principale étant le placement en détention provisoire.


 

Statistiques et chiffres clés (2025)

Au 1er janvier 2025, la situation de l'ARSE en France présentait les caractéristiques suivantes :

Indicateur

Chiffre

Proportion

Personnes sous ARSE

3 466

10,3% des mesures en milieu ouvert

Personnes en détention provisoire

≈ 18 000

Environ 5 fois plus que l'ARSE

DDSE (bracelet après condamnation)

15 750

4,5 fois plus que l'ARSE

Semi-liberté

3 466

Équivalent à l'ARSE

Placement extérieur non hébergé

766

4,5 fois moins que l'ARSE

Ces chiffres montrent que l'ARSE, bien qu'en progression, reste une mesure moins utilisée que la détention provisoire classique, malgré ses avantages potentiels pour la réinsertion et la présomption d'innocence.


 

Avantages et limites de l'ARSE


Avantages


  • Respect de la présomption d'innocence : alternative moins stigmatisante à la détention provisoire

  • Maintien des liens sociaux et familiaux pendant l'instruction

  • Possibilité de continuer à travailler ou à suivre une formation

  • Réduction de la surpopulation carcérale

  • Meilleure préparation à la défense avec un accès plus facile à l'avocat

  • Coût moindre pour l'État par rapport à la détention provisoire


Limites et difficultés


  • Impact psychologique de la surveillance constante

  • Restrictions significatives de la liberté de mouvement

  • Stigmatisation sociale liée au port visible du bracelet

  • Contraintes techniques (nécessité d'électricité, couverture réseau)

  • Dysfonctionnements possibles du dispositif (alarmes injustifiées)

  • Difficultés professionnelles liées aux restrictions horaires


 

Questions fréquentes sur l'ARSE


En quoi l'ARSE diffère-t-elle du bracelet électronique après condamnation (DDSE) ?

L'ARSE s'applique avant jugement, pendant la phase d'instruction, pour des personnes présumées innocentes. La DDSE intervient après une condamnation définitive, soit comme peine autonome, soit comme aménagement d'une peine d'emprisonnement.


La durée passée sous ARSE est-elle prise en compte en cas de condamnation ultérieure ?

Oui, la durée passée sous ARSE est intégralement déduite de la durée de toute peine privative de liberté qui serait ultérieurement prononcée pour les mêmes faits.


Peut-on voyager à l'étranger sous ARSE ?

Non, l'ARSE implique généralement une interdiction de sortie du territoire national. Des autorisations exceptionnelles peuvent parfois être accordées par le juge pour des motifs impérieux.


Qui paie les frais liés à l'ARSE ?

Contrairement à certains pays, en France, la personne placée sous ARSE n'a pas à payer pour le dispositif de surveillance. Ces frais sont pris en charge par l'administration pénitentiaire.


Mon employeur sera-t-il informé que je suis sous ARSE ?

L'administration pénitentiaire respecte la confidentialité de votre situation judiciaire. Cependant, les contraintes horaires peuvent nécessiter d'informer votre employeur si vous avez besoin d'aménagements spécifiques.


L'ARSE peut-elle concerner des mineurs ?

Oui, l'ARSE peut être appliquée aux mineurs de 16 ans ou plus qui encourent une peine d'emprisonnement d'au moins 3 ans.


 

Comment le Cabinet Plouton peut vous accompagner

Si vous ou l'un de vos proches êtes concerné par une mesure d'ARSE ou risquez une détention provisoire, Me Julien Plouton, avocat pénaliste à Bordeaux, peut vous accompagner à chaque étape :


 

N'hésitez pas à contacter le cabinet pour une consultation. Un accompagnement juridique adapté est essentiel pour traverser cette période tout en préparant efficacement votre défense.


Article rédigé par Me Julien Plouton, avocat au Barreau de Bordeaux spécialisé en droit pénal. Les informations contenues dans cet article sont d'ordre général et ne sauraient constituer un avis juridique personnalisé. Pour toute question spécifique, veuillez consulter un professionnel du droit.

Dernière mise à jour : mars 2025

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