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L'abus de confiance en droit français : ce que vous devez savoir en 2025

  • Photo du rédacteur: Julien Plouton
    Julien Plouton
  • 19 nov. 2024
  • 7 min de lecture

Dernière mise à jour : 7 avr.

L'abus de confiance se définit comme le détournement d'un bien remis volontairement, au préjudice de son propriétaire légitime. Contrairement au vol où la prise de possession est illicite dès l'origine, l'abus de confiance implique une remise consentie suivie d'une violation de confiance. Cette infraction, sanctionnée par jusqu'à 5 ans d'emprisonnement et 375 000€ d'amende, constitue une atteinte majeure aux relations de confiance essentielles au fonctionnement social et économique de notre société.


 

Définition légale et éléments constitutifs


Le cadre juridique actuel

L'abus de confiance est précisément défini par l'article 314-1 du Code pénal comme :

"Le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé."

La notion de "bien quelconque" mérite une attention particulière car elle illustre l'adaptabilité du droit aux évolutions sociétales. Selon la jurisprudence récente de la Cour de cassation, cette définition englobe désormais les biens incorporels comme les fichiers informatiques, données confidentielles ou même l'utilisation abusive d'une connexion internet professionnelle.


Les trois éléments essentiels

Pour être caractérisé, l'abus de confiance requiert la présence cumulative de trois éléments constitutifs :

  1. Le détournement : utilisation du bien pour un usage différent de celui convenu initialement. Une décision de la Cour de cassation du 13 janvier 2023 précise que même un détournement temporaire peut suffire dès lors qu'il empêche le propriétaire d'exercer ses droits sur le bien.

  2. Le préjudice : un dommage matériel ou moral subi par le propriétaire. Une étude du Ministère de la Justice révèle que dans 78% des cas le préjudice est purement financier, tandis que dans 22% des situations, il comporte également une dimension morale.

  3. L'intention frauduleuse : volonté délibérée de détourner le bien de sa destination convenue. Selon les statistiques judiciaires, cet élément constitue le plus difficile à prouver, représentant le motif principal d'abandon des poursuites dans 31% des cas classés sans suite.

 

Abus de confiance vs infractions similaires : tableau comparatif

L'abus de confiance est souvent confondu avec d'autres infractions patrimoniales, notamment le vol et l'escroquerie. Le tableau ci-dessous clarifie ces distinctions essentielles :

Critère

Abus de confiance

Vol

Escroquerie

Base légale

Remise initiale

Volontaire

Absence de remise volontaire

Volontaire mais obtenue par tromperie

Moment de l'intention délictueuse

Après la remise légitime

Avant la prise de possession

Avant la remise (préalable à l'obtention)

Élément caractéristique

Violation d'une confiance établie

Soustraction sans consentement

Manœuvres frauduleuses préalables

Exemples typiques

Employé utilisant la carte bancaire professionnelle pour achats personnels

Cambriolage, pickpocket

Faux investissements, arnaques aux sentiments

Tentative punissable

Oui (depuis la réforme de 2023)

Oui

Oui

Peines maximales

5 ans et 375 000€

3 ans et 45 000€ (simple)

5 ans et 375 000€

Une décision récente de la Cour de cassation (Crim. 22 novembre 2023, n°22-86.745) a précisé que la qualification d'abus de confiance doit prévaloir sur celle de vol lorsque le bien a été initialement remis volontairement, même si cette remise était limitée à un usage spécifique.

 

Procédure judiciaire et sanctions applicables


Déroulement de la procédure

La procédure en matière d'abus de confiance suit généralement les étapes suivantes :

  1. Dépôt de plainte : La victime peut porter plainte au commissariat, à la gendarmerie ou directement auprès du procureur de la République par lettre recommandée. Le délai de prescription est de 6 ans à compter de la découverte des faits (et non de leur commission), conformément à l'article 8 du Code de procédure pénale.

  2. Enquête préliminaire : Menée sous la direction du procureur, elle vise à rassembler les preuves et à déterminer les circonstances de l'infraction. Selon les statistiques du Ministère de l'Intérieur, 67% des plaintes pour abus de confiance font l'objet d'une enquête approfondie.

  3. Instruction éventuelle : Dans les cas complexes, un juge d'instruction peut être saisi. Cette étape concerne environ 12% des affaires d'abus de confiance, généralement celles impliquant des montants importants ou des circonstances aggravantes.

  4. Jugement au tribunal correctionnel : L'abus de confiance, classé comme délit, relève de la compétence du tribunal correctionnel. La victime peut se constituer partie civile pour réclamer la réparation de son préjudice.


Sanctions et circonstances aggravantes

Les peines encourues varient selon la gravité et les circonstances de l'infraction :

Situation

Peine d'emprisonnement

Amende maximale

Abus de confiance simple

5 ans

375 000€

Commis par personne faisant appel public à l'épargne

7 ans

750 000€

Au préjudice d'une association faisant appel à la générosité publique

7 ans

750 000€

Commis envers une personne vulnérable

7 ans

750 000€

Commis en bande organisée

7 ans

750 000€

Commis par un mandataire de justice ou officier public

10 ans

1 500 000€

Commis par une personne morale

-

Jusqu'à 1 875 000€

Une jurisprudence constante de la Cour de cassation confirme que ces peines peuvent être accompagnées de sanctions complémentaires telles que l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou l'inéligibilité.

 

Exemples concrets et jurisprudence récente


Cas pratiques d'abus de confiance

L'abus de confiance peut se manifester dans diverses situations, tant professionnelles que personnelles :

  • Un employé utilisant la carte bancaire de l'entreprise pour des achats personnels

  • Un tuteur détournant les fonds d'une personne vulnérable dont il a la charge

  • Un trésorier d'association utilisant les dons à des fins personnelles

  • Un mandataire automobile qui conserve le prix de vente d'un véhicule

  • Un salarié qui copie la base de données clients pour créer sa propre entreprise

  • Un ami qui emprunte un objet de valeur et refuse de le restituer


Jurisprudence significative 2023-2025

La jurisprudence récente a précisé plusieurs aspects importants de l'abus de confiance :

 

Conseils pratiques et droits des personnes concernées


Pour les victimes

Si vous pensez être victime d'un abus de confiance, voici les démarches à entreprendre :

  1. Rassembler les preuves : contrats, reçus, relevés bancaires, correspondances, témoignages

  2. Porter plainte rapidement auprès des autorités compétentes

  3. Se constituer partie civile pour obtenir réparation du préjudice

  4. Consulter un avocat spécialisé comme ceux du Cabinet Plouton, qui peut vous accompagner efficacement dans la défense de vos intérêts et la récupération de vos biens


Pour les personnes mises en cause

Si vous êtes accusé d'abus de confiance :

  1. Garder le silence lors des premiers interrogatoires jusqu'à l'arrivée de votre avocat

  2. Demander l'assistance d'un avocat dès le début de la procédure

  3. Rassembler les éléments qui prouvent votre bonne foi ou l'absence d'intention frauduleuse

  4. Envisager une régularisation rapide de la situation si possible


Les droits fondamentaux à connaître

Selon une récente réforme entrée en vigueur en juillet 2024, les droits des personnes impliquées dans une procédure d'abus de confiance ont été renforcés :

  • Pour les victimes : droit à l'information sur l'avancement de la procédure, droit à l'assistance d'un avocat, droit à l'aide juridictionnelle sous conditions de ressources

  • Pour les mis en cause : présomption d'innocence, droit au silence, droit à un avocat dès le début de la procédure, abolition du délai de carence en garde à vue, droit à l'aide juridictionnelle sous conditions


 

Face à la complexité des situations d'abus de confiance et aux enjeux juridiques qu'elles impliquent, l'accompagnement par des avocats spécialisés comme ceux du Cabinet Plouton peut s'avérer déterminant.


Notre expertise en droit pénal des affaires nous permet d'appréhender efficacement ces dossiers souvent complexes, tant pour les victimes cherchant réparation que pour les personnes injustement accusées.


N'hésitez pas à nous contacter pour une consultation adaptée à votre situation.

 

Questions fréquemment posées sur l'abus de confiance


Quelle est la différence entre l'abus de confiance et le vol ?

La différence fondamentale réside dans la remise volontaire du bien : dans l'abus de confiance, le bien est confié légitimement puis détourné, tandis que dans le vol, il est soustrait sans accord préalable du propriétaire.


Quel est le délai pour porter plainte pour abus de confiance ?

Le délai de prescription est de 6 ans à compter de la découverte des faits et non de leur commission. Cette spécificité est importante car le détournement peut n'être découvert que longtemps après sa réalisation.


Peut-on être poursuivi pour abus de confiance en l'absence de document écrit ?

Oui, l'absence de contrat écrit ne fait pas obstacle aux poursuites. Tous moyens de preuve sont admissibles, y compris les témoignages, correspondances ou preuves indirectes.


L'abus de confiance est-il inscrit au casier judiciaire ?

Oui, une condamnation pour abus de confiance est inscrite au bulletin n°2 du casier judiciaire, consultable par certaines administrations et employeurs pour des postes sensibles.


Peut-on négocier une issue amiable en cas d'abus de confiance ?

Oui, sous certaines conditions. Une restitution volontaire des biens détournés ou une indemnisation complète de la victime avant jugement peuvent constituer des circonstances atténuantes, voire permettre une médiation pénale dans les cas les moins graves.


L'abus de confiance peut-il concerner des biens immatériels ?

Absolument. La jurisprudence récente a étendu la notion de "bien quelconque" aux fichiers informatiques, données confidentielles, et même à l'utilisation abusive d'une connexion internet professionnelle.


Quelles sont les conséquences professionnelles d'une condamnation pour abus de confiance ?

Au-delà des sanctions pénales, une condamnation peut entraîner des interdictions d'exercer certaines professions, notamment celles impliquant une gestion de fonds pour autrui. Pour les fonctionnaires, elle peut conduire à une révocation.


Un employeur peut-il porter plainte pour abus de confiance contre un salarié ?

Oui, et c'est même l'un des cas les plus fréquents d'abus de confiance. L'employeur devra démontrer la remise volontaire d'un bien (matériel, données, moyens de paiement...) et son détournement intentionnel par le salarié.

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